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  2021, 04 avril . Enseignement supérieur . Ressources et supports scolaires . .

Santé-prévention, c’est le sujet du TIPE 2021-2022

© Inria / Photo C. Morel

TIPE ? Comme tous les ans, en lien avec sillages.info et l’UPS pour les CGPE, Interstices et Pixees vous proposent des ressources autour des sciences du numérique, de l’information et des mathématiques.

Le thème pour l’année 2021-2022 du TIPE commun aux filières BCPST, MP, PC, PSI, PT, TB, TPC et TSI est intitulé : santé-prévention.

Introduction
La reconnaissance vidéo d’activités pour le suivi personnalisé de patients atteints de troubles cognitifs
Nouvelles approches d’optimisation pour définir les tests groupés – ou « group testing »
Épidémiologie numérique : améliorer l’efficacité des soins et prévenir
De la dengue à la lutte antivectorielle biologique


Comme probablement tous les secteurs de l’activité humaine, le numérique est en train de s’ancrer profondément en santé. Cette tendance a débuté il y a longtemps avec les premiers logiciels liés à l’imagerie médicale et la généralisation des outils numériques de gestion médico-administrative, comme les dossiers patients informatisés ou l’informatisation des données de remboursement de soins. Avec cette évolution, les données de santé sont devenues de plus en plus accessibles aux chercheurs et aux chercheuses dans des volumes importants, ce qui permet principalement d’envisager aujourd’hui la mise en place de systèmes capables d’assister les médecins lors des étapes de la décision médicale personnalisée : diagnostic, prédiction de l’évolution de la maladie ou choix de la meilleure thérapie.
Le domaine de la prévention des maladies est lui aussi impacté par cette évolution. Au niveau médical par exemple, l’émergence de données « de vie réelle » capturées hors des salles de soin proprement dites (caméras, smartphones, capteurs) promet un suivi automatisé et personnalisé de l’évolution de la pathologie des patients. Au niveau de la population, de nouveaux outils numériques permettent d’analyser les données des bases médico-administratives pour des objectifs issus de l’épidémiologie, c’est-à-dire l’étude de la fréquence, la distribution et les facteurs associés aux problèmes de santé de la population et la surveillance de leur évolution. Bien entendu, les crises actuelles liées aux maladies infectieuses fournissent elles aussi le cadre d’une implication accrue du numérique, par exemple pour optimiser les politiques d’intervention, concernant les stratégies de confinement, de test, de vaccination, ou de gestion des populations de vecteur animaux. Les exemples ci-dessous illustrent quelques-unes des nombreuses applications du numérique dans le domaine de la santé et de la prévention.
 
Hugues Berry, Adjoint au directeur scientifique d’Inria pour la biologie et la santé numérique

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La reconnaissance vidéo d’activités pour le suivi personnalisé de patients atteints de troubles cognitifs
Les progrès récents de la vision artificielle permettent aujourd’hui  d’observer et d’analyser nos comportements. On pense immédiatement à Big Brother, mais bien d’autres applications, tout à fait louables, sont envisagées. En particulier  dans un domaine qui manque cruellement de réponses : le diagnostic, le  suivi de patients présentant des déficits cognitifs liés au vieillissement et à l’apparition de maladies neurodégénératives comme la maladie d’Alzheimer, et le maintien à domicile de ces personnes âgées. 
    
Les recherches de l’équipe Stars visent notamment à quantifier le déclin cognitif des patients Alzheimer. Il est important de détecter le plus tôt possible les premiers signes annonciateurs de difficultés à venir. Nous testons par  exemple au CHU de Nice un dispositif visant à évaluer la situation d’un patient en lui proposant de passer cinq minutes dans une pièce équipée de capteurs vidéo, où il doit effectuer une liste de tâches comme préparer une boisson, téléphoner, lire, arroser des plantes… Nos logiciels permettent ainsi d’obtenir automatiquement une évaluation normalisée des éventuels déficits cognitifs de chaque patient et ainsi de leur proposer un traitement adapté. 
    
Pour aller plus loin :
François Bremond, Inria, équipe STARS

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Nouvelles approches d’optimisation pour définir les tests groupés – ou « group testing »
Afin de dépister une population, on peut soit tester l’ensemble des individus un par un, ce qui implique un nombre important de tests, ou bien tester des groupes d’individus. Dans ce cas, toutes les personnes subissent un prélèvement, et l’on réalise un seul test dans le groupe : s’il s’avère négatif, cela signifie que tout le groupe est négatif ; s’il est positif, on procède alors à des tests individuels complémentaires. Cette approche permet ainsi de réduire nettement le nombre d’analyses à réaliser, tout en restant fiable.
D’autres approches basées sur le même principe mais plus complexes peuvent être considérées.
Les chercheurs de l’équipe projet  Inocs (Integrated Optimization with Complex Structure)  du centre Inria Lille-Nord Europe ont apporté une réponse à la question suivante dans le cadre de la Covid 19: Comment former ces groupes – et selon quels critères – afin de garantir l’efficacité de la procédure ? 
Plus précisément des modèles d’optimisation basés sur la théorie des graphes ont été définis. Des méthodes de résolutions exactes ont été développées afin de déterminer la taille optimale des groupes ainsi que leurs constitution de façon à atteindre différents objectifs en tenant compte de contraintes spécifiques des tests. Les objectifs  peuvent être  la minimisation du nombre de tests, la minimisation du nombre de faux négatifs,  la minimisation du nombre de faux positifs ou une combinaison de ces critères.
L’efficacité des méthodes de résolutions est prouvée par des tests sur des données publiques ou des données issues du CHU de Lille. 
Pour aller plus loin :
Luce Brotcorne, Inria, équipe INOCS

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Épidémiologie numérique : améliorer l’efficacité des soins et prévenir les risques grâce aux données

L’épidémiomogie est révolutionnée par l’utilisation des outils numériques [1,2]. L’épidémiologie s’intéresse à faire des corrélations entre des facteurs (génétiques, démographiques, traitements) et la survenue d’événements médicaux. Des questions usuelles sont par exemple: un traitement est-il réellement efficace ou non ? dans quelles circonstances un traitement à des effets indésirables ? 
L’utilisation de méthodes d’analyse statistique, d’analyse de données ou d’intelligence artificielle appliquées à de grandes bases de données médicales offre de nouvelles perspectives à l’épidémiologie : elles permettent de répondre rapidement aux questions de santé publique, et elles permettent d’identifier des corrélations à propos des situations rares grâce à leur capaci à traiter de très grands volumes de données.
Mais quelles bases de données peuvent être utilisées ? Ce peut être des bases constituées spécifiquement pour répondre à une question mais les épidémiologistes disposent également de base de données collectées auprès des patients dans les hôpitaux [3] ou par l’asurrance maladie [4]. Ces dernières permettent de reconstruire nos parcours de soins.
Dans un cadre réglementaire strict, ces données peuvent servir à répondre à certaines questions épidémiologiques.  L’épidéliologiste devient alors un analyste : face à ces bases de données, il doit les faire « parler » et mobiliser pour cela toute une
panoplie d’outils numériques qui vont l’aider à sélectionner des cohortes de patients, détecter des facteurs/événements médicaux
d’intérêt, identifier les corrélations et les relier à des connaissances médicales. Et pour faire face à la complexité et à la volumétrie des données, il utilise les techniques numériques les plus avancées en analyse de données et intelligence artificielle.
Pour aller plus loin :
[1] Symposium du Collège de France « Le futur de l’épidémiologie à l’ère des « big data » »
[2] Dossier Inserm « Comment le Big data révolutionne la recherche en santé »
Thomas Guyet, Institut Agro, équipe LACODAM

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De la dengue à la lutte antivectorielle biologique
Le virus de la dengue, mais aussi ceux du chikungunya, de la fièvre zika, de la fièvre jaune, sont transmis aux humains par plusieurs espèces de moustiques du genre Aedes. La fièvre jaune est la plus grave de ces maladies. Elle touche 200.000 personnes par an dans le monde entier, dont 30.000 décèdent. Aucun remède n’est connu, mais un vaccin préventif existe, sûr et efficace (obligatoire par exemple pour voyager en Guyane…).
Pour les autres maladies, il n’existe actuellement aucun vaccin satisfaisant, et aucun remède. La plus répandue est la dengue, avec près de 400 millions de cas annuels, dont 500.000 prennent une forme hémorragique grave, mortelle dans 2,5% des cas. Ainsi, la mortalité de la dengue est bien inférieure à celle de la fièvre jaune, mais l’ordre de grandeur des décès qu’elles provoquent est le même.
Près de 4 milliards de personnes vivent dans des zones où elles risquent d’attraper la dengue. Initialement présente dans les régions tropicales et subtropicales du monde, cette maladie s’étend aux zones tempérées des deux hémisphères, en suivant la lente invasion de ces régions (probablement favorisée par le réchauffement climatique) par l’espèce Aedes albopictus — le fameux moustique tigre, plus résistant au froid que le vecteur « historique » qui peuple les régions tropicales, Aedes ægypti. Non détecté en France métropolitaine avant 2004, le moustique tigre est maintenant considéré comme installé dans 64 de ses départements.
La dengue a touché l’Europe dans le prolongement de cet essor, apportée de zones endémiques par des voyageurs infectés, puis transmise lors d’une piqûre à des moustiques locaux. En 2020, 834 cas de dengue importés ont été confirmés en France métropolitaine, mais aussi 13 cas autochtones.
En l’absence de vaccin, la prévention individuelle contre ces maladies consiste essentiellement en des mesures de protection contre les piqûres. La prévention collective repose sur divers moyens de lutte antivectorielle. Il s’agit en premier lieu de mesures d’éducation sanitaire et de mobilisation sociale destinées à réduire les gîtes de ponte. Par ailleurs, l’usage d’insecticides tend actuellement à diminuer: non seulement l’absence de spécificité de ces produits les rend dangereux à d’autres espèces, mais ils induisent un phénomène de résistance qui réduit leur efficacité.
Des méthodes de lutte biologique, plus spécifiques, sont maintenant étudiées. La plus ancienne est la technique de l’insecte stérile, consistant à lâcher dans la nature de grandes quantités de moustiques mâles élevés en laboratoire, et stérilisés par irradiation dans des installations spécialisées : leur accouplement avec les femelles en liberté a pour effet de réduire la taille de la population sauvage, et de diminuer ainsi la propagation des virus. Une autre méthode, plus récemment conçue, consiste à inoculer ces moustiques avec une bactérie appelée Wolbachia, naturellement présente chez la plupart des arthropodes. Cette bactérie a la propriété remarquable de réduire leur capacité de transmettre la dengue, le zika et le chikungunya à ceux qu’ils piquent. Elle passe de la mère à la progéniture, et c’est en lâchant des moustiques intentionnellement infectés en laboratoire par Wolbachia que l’on compte réaliser sa mise en œuvre. Des essais correspondants commencent à avoir lieu en plusieurs points du globe, y compris en Nouvelle-Calédonie. Les mathématiques appliquées participent à l’analyse qualitative et quantitative de la faisabilité de ces méthodes de lutte contre des infections graves émergeant en Europe.
 
Pour en savoir plus:
  • Sur la dengue et les stratégies de lutte
  • A propos des vecteurs et de leur implantation
  • Sur le principe des méthodes de lutte biologique utilisant les insectes stériles ou la bactérie Wolbachia
  • Sur les enjeux de la recherche
 
Quelques articles mathématiques sur le sujet
  • Insecte stérile
  • Wolbachia
Pierre-Alexandre Bliman, Inria, équipe Mamba
Dernière modification : juillet 2022.
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